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Comment les consommateurs européens réagiront-ils aux tarifs douaniers américains ?

Par Adam Baumann, Luca Caprari, Maarten Dossche, Georgi Kocharkov et Omiros Kouvavas


Les nouveaux tarifs douaniers américains imposés sur les produits européens incitent les consommateurs européens à réfléchir à deux fois au contenu de leur panier. En règle générale, l’ampleur de l’effet des tarifs sur les consommateurs dépend de l’élasticité-prix de la demande pour les produits et services concernés – ce qui signifie que les consommateurs peuvent se tourner vers des alternatives moins chères si les prix augmentent. Cependant, les récents tarifs américains pourraient entraîner un changement plus large des préférences, incitant les Européens à se détourner entièrement des produits et des marques américaines, indépendamment des variations de prix.


Cet article de blog utilise les données de l’enquête sur les attentes des consommateurs (CES) de la BCE pour mieux comprendre comment les consommateurs pourraient réagir aux tarifs potentiels et les raisons de leurs choix. En mars 2025, il a été demandé aux participants du CES dans quelle mesure ils étaient susceptibles de se détourner des produits américains en réponse à d’éventuels tarifs douaniers américains et à d’éventuelles représailles de l’UE.[1] Trois scénarios différents ont été présentés aux consommateurs : des augmentations de tarifs potentiels de 5 %, 10 % ou 20 %. Il a également été demandé aux répondants la principale raison de leur substitution ou non-substitution des produits américains, avec des options faisant référence au prix, à la préférence ou au manque d’alternatives.[2]


Les préférences se détournent des produits américains


Les résultats montrent que les consommateurs sont très disposés à se détourner activement des produits et services américains. Le score médian de substitution était de 80 sur une échelle de 0 à 100, où 0 indique aucune volonté d’acheter des alternatives aux produits américains et 100 signifie une forte volonté de le faire.


Le graphique 1 (panneau a) illustre le degré médian de substitution des produits et services américains par pourcentage tarifaire hypothétique et la raison principale du changement. Bien que la substitution des produits américains soit élevée dans tous les scénarios tarifaires, elle est beaucoup plus élevée pour les répondants qui indiquent un changement de préférence, plutôt que le changement de prix déclenché par le tarif, comme raison principale. Cela suggère que les réactions des consommateurs ne sont peut-être pas seulement une réponse temporaire aux augmentations de tarifs, mais signalent plutôt un possible changement structurel à long terme dans les préférences des consommateurs, s'éloignant des produits et marques américains.


Ces résultats diffèrent d’enquêtes similaires menées aux États-Unis, où les consommateurs ont déclaré qu’ils stockeraient des biens dont le prix devrait augmenter en raison de tarifs potentiels.[3] Dans la zone euro, cependant, il semble que la simple présence d’un tarif inciterait une grande partie des consommateurs à reconsidérer leurs achats. Globalement, environ 44 % des répondants ont exprimé leur volonté de réorienter leurs dépenses des produits américains, indépendamment du taux tarifaire et principalement en raison d’une préférence pour le changement (graphique 1, panneau b). Pour ce groupe, le score médian de substitution était de 95 et est resté presque inchangé malgré les augmentations tarifaires aléatoires de 5 %, 10 % et 20 %.


Graphique 1

Disposition à remplacer et raison du remplacement

Source : CES.

Notes : La dernière observation date de mars 2025. Données pondérées. Pourcentage médian.


Les réactions des consommateurs dépendent de leurs revenus


En général, l’élasticité-prix tend à diminuer avec le revenu. Lorsque les prix augmentent, les personnes à faibles revenus doivent souvent reconsidérer leurs décisions d’achat, tandis que celles à revenus plus élevés sont moins affectées. Cependant, les données du CES montrent que la volonté des répondants de substituer des produits et services américains augmente avec chaque quintile de revenu (Graphique 2, panneau a). Contrairement à la tendance habituelle, nos résultats suggèrent que plus les revenus des personnes sont élevés, plus elles sont susceptibles de changer. Ce résultat inattendu pourrait être attribué au fait que les ménages à revenus plus élevés peuvent être plus motivés par la préférence que par les préoccupations de prix. Même s’ils pourraient se permettre des produits et services américains plus chers, ils choisissent consciemment des alternatives.


Le graphique 2 (panneau b) montre que le pourcentage de répondants citant la préférence comme raison principale de substitution augmente avec le revenu du ménage déclaré, tandis que l’influence du prix diminue. De même, les consommateurs qui allouent une plus grande partie de leurs dépenses à des articles discrétionnaires, tels que le multimédia ou les loisirs, ont un score de substitution plus élevé que les consommateurs qui dépensent plus pour des nécessités comme la nourriture ou l’électricité (graphique 2, panneau a). C’est donc la préférence qui compte, pas le prix.


En ce qui concerne l’avenir, les réponses du CES indiquent que les développements géopolitiques et commerciaux en cours pourraient entraîner des changements significatifs dans les dépenses de consommation, en particulier en ce qui concerne les produits américains. Nos conclusions indiquent que, dans le contexte actuel, les réactions des consommateurs pourraient donc s’écarter considérablement des schémas de consommation standard des manuels en réponse à des tarifs plus élevés.


Graphique 2

Volonté de substitution et raisons de la substitution – revenu et consommation

Notes : La dernière observation date de mars 2025. Données pondérées. Les quintiles de revenu et de consommation sont calculés au sein de chaque pays.


Les opinions exprimées dans chaque article de blog sont celles de l'auteur (ou des auteurs) et ne représentent pas nécessairement les vues de la Banque centrale européenne et de l'Eurosystème.

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